25 avril 2009

Lettre de Canala 2 : brizhvarc'hadourezh et ordinary things



Qu'est ce qu'une lettre de Canala ?

C'est un texte en plusieurs parties destiné à accompagner l'exposition " A quoi rêvent les laveuses et autres contes " . Il est signé X.  comme Xârâcùù, la langue parlée à Canala.
Mais il  pourrait être signé Gonçalo Campos Dias.  Ou le Koala. Ou  X Jean Louis. Ou Délio.
Ce sont les hétéronymes de mon critique d'art préféré.
On s'en fiche que l'exposition soit terminée depuis le 8 avril. On s'en fiche.

Comme l'exposition, ce texte est un collage. Je le trouve très beau.  Peut être un peu flâtteur et je prends  garde à ne pas lâcher le fromage que je tiens dans mon large bec.

Lettre de Canala 2

Well, Shakespeare ?
He's in the alley
Speaking to some french girl
Who says she knows me well.
Want to send a message
But the post office has been stolen
And the mail box is locked. (5)

On en était restés au travail, ou plutôt non, au pas de côté, au pas  que le travail ( Jean Marie Tjibaou a dit ( Mano aussi dans ses TPE) : " Dans notre système, l'homme n'est pas le maître".) :

Os tanques tinham sempre uma baba de roupa que foi posta em primeiro sabao. A lavadeira era uma espécie de Coré que velava sobre os sinais de vida e de morte. Procedia a lavagem das toalhas enegrecidas do lastro gordurento da cozinha ou manchadas de vinho espesso e roxo. Ela sabia a casta da uva so de ver a sua nodoa ; sabia das regras das mulheres e da sua vida genital, so de tocar os panos sanguinolentos (...) A lavadeira era muda, duma familia de mudos e idiotas. Mas ela, Ritinha, singularmente curiosa e alegre de perceber o mundo. (1)

(Les lavoirs étaient toujours plein  de linge mis à tremper. La laveuse était une sorte de Coré qui veillait sur les signes de vie et de mort.  Elle lavait les toiles noircies par la graisses des cuisines ou tachées par le vin épais et rouge sombre. Elle devinait de quel cépage il s'agissait d'après la tache ; elle connaissant les règles des femmes et leur vie génitale rien qu'en  touchant les linges sanguinolents (tu aimais bien ce mot ( oui et j'aime toujours) ) (...)  La laveuse était muette et venait d'une famille de muets et d'idiots. Mais elle, Ritinha, extrêmement curieuse et joyeuse de comprendre le monde) 
Je traduis un peu à la va-vite mais cette lettre doit être polyglotte. ( et je rajoute mon grain de sel peut être maltrapropos)


"Mais à Hawaï, la beauté est, semble-t-il placée au cour de la société : elle est le principe qui fonde son organisation." (2) Marshall Sahlins n'en est pas si sûr mais on fait, désespérément comme si... Il risque même, après le dionysiqaue et l'appolinien, un modèle  culturel océanien "aphrodisien". Tu n'aurais pas commencé une série aphrodisienne et planante ?

Puisqu'on est dans le psychédélique, écoute un peu ce que disait Brian Eno, pour expliquer son travail :
" making the ordinary interesting, which I've always been interested in doing (...) finding a pre-delivered message, which you put in a context so that the meaning is changed, or the context amplifies certains aspects of the meaning " (3)

Anjela Duval n'a peut-être pas plus connu Brian Eno qu'Yvonne Verdier mais aurait-elle correspondu avec Chaissac ?

Ma skrivan da noz war  gein goleier lizhiri
Barzhonegoù dister : brizhvarc'hadourezh
Na gaver enno nemet bleunioù gouez
Hag ur vruzhunnen karantez
Rak kement-man a ran evit ar re a garan
Barzhonegoù-noz, Barzohenegoù-deiz  Genver 1966

(Si j'écris le soir au dos d'enveloppes
Des poèmes humbles : camelote
Où l'on ne trouve que des fleurs sauvages ...
Et quelques miettes d'amours.
Car tout cela je le fais pour ceux que j'aime "

Poèmes de la nuit, poèmes du jour, janvier 1966 ) (4)

Tout ça pour dire que Christine Choffey, l'affranchie petite-fille de facteur muet, est attendue à Canala.  Pas très loin des PTT ( OPT en calédonien) Le code postal ? 98813 et il y a des timbres et toutes ces sortes de camelote ( brizhvarc'hadourezh) et d'ordinary things ( l'amour ! la nuit, le jour) sans lesquelles nous ne saurions vivre, n'est ce pas ?

A propos döö   veut dire  " colonne vertébrale" en  xârâcùù.
x

(1) Jean Marie Djibaou  La pensée kanak, odile Jacob 1996
(2) Agustina Bessa Luis  Vale Abraao Guimaraes editores Lisboa 1999
(3) Marshall Sahlins Des îles dans l'histoire Hautes études Gallimard Le seuil Paris 1989
(4) Brian Eno  interview by R Williams Melody maker 1980
(5) Anjela Duval Quatre poires traduit par Paol Keineg Mignoned Anjela 2003
(6) Bob Dylan  Stuck inside Memphis with the Memphis blues again  Blonde on blonde Columbia 1966 Please check the words Mano...

4 commentaires:

Agnès a dit…

How long will you be staying there? Forever? For good? (a lire avec l'accent de la reine, please)

christinecho a dit…

18 mois, je crois... plus si affinités. quelle aventure.
What a life...

Anonyme a dit…

j'aime bien ton musée personnel
Momo

Agnès a dit…

A wonderful life!