Le voyage à Emma

J'ai fait le voyage jusqu'à la tribu d'Emma hier midi pour raccompagner L. qui faisait du "pouce" avec son bébé.
Tribu est un mot bizarre, mot de la colonisation, né du règlement du 24 décembre 1867, qui repoussait les Kanaks dans des réserves, les privant d'une grande partie de leurs terres coutumières et perturbant l'organisation traditionnelle des clans.
Aujourd'hui, la plupart des gens emploient le mot dans la vie courante. Sur son carnet de correspondance, Anjela n'a pas rempli la case tribu, elle habite le village qui n'est pas une tribu.
Canala compte un grand nombre de "tribus" qui ont chacune un chef coutumier, une maison commune. Vu de l'extérieur, c'est juste un lieu habité, on dirait un hameau mais c'est bien sûr beaucoup plus.
Bref, Emma est éloigné du village et dans la montagne, il y a une navette le matin et le soir, sinon, il faut marcher ( idéal pour retrouver une taille de jeune fille). Heureusement depuis peu la route est coaltarée ( je ne traduis pas) Ce qui frappe dans le paysage c'est l'omniprésence des pins (1)et le calme absolu qui y règne.
Pour y arriver, on passe près de l'ancien établissement thermal ( il y a des sources chaudes) que le maire tente depuis plusieurs années de réouvrir et qui eut paraît-il son heure de gloire ( on y venait de loin, de Nouvelle Zélande, me dit quelqu'un, c'est dur à imaginer, qu'il y eut là un jour un grand hotel, il ne reste plus qu'un mur.)

(1) qu'on ne confondra pas avec le pin colonnaire, arbre endémique, que James Cook prit pour une colonne de basalte alors qu'il approchait de la côte. Le pin colonnaire ( ci dessous) est un araucaria mais qui n'a pas la même forme que celui des Açores.
Il est planté sur les lieux sacrés. Il signale un habitat ancien.
Il incarne le pouvoir du chef ; quand un chef meurt, on dit : " les bourgeons des sapins tombent à terre". ( source : guide des plantes du chemin kanak, centre Tjibaou)